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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/326

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LE ROI VIERGE

te sacrifier, devenir une honnête femme ?

À son tour, elle eut un grand rire.

— Je ne suis pas une sotte, peut-être ! mais je l’aime, entends-tu, je l’aime ! et je veux qu’il me veuille. Je n’ai pas changé, non ! Vois mes yeux, vois mes lèvres ; tu reconnais bien leurs flammes et leur pourpre, hein ? Seulement, j’ai pour lui seul, à présent, tout l’amour que j’avais pour tous. Ah ! voilà, c’est agaçant pour les autres, je ne dis pas, mais il faut en prendre son parti. Je choisis, pour la première fois ! De quoi te plains-tu, d’ailleurs ? Est-ce que cet amour-là ne servira pas tes projets ?

— Au fait, c’est vrai, dit Brascassou.

En ce moment, le prince Flédro entra.

— Eh bien ? cria Gloriane, avec une humidité rouge aux lèvres.

— Tout va mal, dit le chambellan. Vous avez épouvanté le roi. Vous êtes trop étrange, trop furieuse ! Il a eu peur ! Il s’est enfui.

— Mille dious ! dit Brascassou, atterré.

Gloriane était devenue pâle. Elle laissait tomber ses cheveux, ses bras, les longs plis de sa robe blanche.

Tout à coup elle prit le prince par le bras,