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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/342

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LE ROI VIERGE

En parlant, ou plutôt en murmurant ainsi, car sa voix avait la douceur d’une plainte d’oiseau qui se meurt dans son nid, Lisi avait levé hors des draps ses petits bras si menus et si grêles qu’on les eût pris pour des ailerons sans plumes, et maintenant elle les tendait vers Frédérick avec un tremblement.

Mais lui, muet et morne, hébété, il ne s’approcha pas ; ses yeux, pleins d’un étonnement qui s’épouvante, allaient comme inconsciemment de la pauvre archiduchesse expirante à la grave reine en prière.

Deux longues larmes coulèrent des yeux de la mourante ; elle bégaya en laissant retomber ses bras dans un découragement suprême :

— C’est fini, c’est fini ! tu ne m’aimes pas ! Oh ! comme tu es cruel ! Si tu n’as pas d’amour pour moi, tu peux bien avoir un peu de pitié, enfin, puisque je vais mourir. Que t’en coûterait-il de me donner la main ? Si tu savais comme c’est affreux de mourir quand on est toute jeune, quand on avait tant de belles espérances ! Eh bien, si tu me donnais la main. J’aurais moins peur d’aller dans la mort, parce que tu aurais