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LA RESTITUTION, C’EST LE VOL !

sonnes qui établiraient leurs qualités de légitimes propriétaires et de déposants primitifs desdits objets. » Grâce à ce bienfaisant décret, vous pouvez espérer que les objets engagés par vous vous seront remis avant trois ou quatre cents jours.

Comptez sur vos doigts, s’il vous plaît : on évalue à 1,200,000 le nombre des articles sur lesquels porte cette mesure de la Commune. Comme il y trois magasins seulement, les dégagements ne pourront avoir lieu que dans trois bureaux, et, en tenant compte des difficultés que présentera inévitablement la constatation de l’identité de chaque réclamant, je ne pense pas qu’il soit possible de restituer plus de trois mille objets par jour. La Commune dit qu’elle en restituera quatre mille ; mais la Commune ne sait pas ce qu’elle dit. Admettons cependant les quatre mille restitutions ; combien de temps dureront les dégagements ? dix ou douze mois.

Pendant ce temps, hommes et femmes, à qui la misère a depuis longtemps appris le chemin du triste Mont-de-Piété, pendant ce temps, vous vous lèverez tous les jours aux heures les plus matinales, vous négligerez de vous livrer à vos travaux ordinaires, qui vous font vivre cependant, et vous irez, suant l’été, gelant l’hiver, faire la queue ; quelquefois vous obtiendrez de vous asseoir sur un banc de bois dans les grandes salles nues, et lorsque vous aurez attendu longtemps, bien longtemps, il arrivera que votre numéro, tiré au sort, vous obligera à revenir le lendemain, le surlendemain, pendant un mois, pendant deux mois, pendant un an peut-être.

À vrai dire, il serait injuste de blâmer la Commune au