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LA DÉFECTION DE M. ROSSEL.

nus à Mazas comme des assassins, des religieuses enfermées à Saint-Lazare comme des filles de joie ; je lui en veux parce qu’elle espère forcer au crime de la guerre civile des gens qui se sont ou qui se seraient battus contre les Prussiens, mais qui ne veulent pas se battre contre les Français ; je la hais à cause des pères de famille qu’elle envoie à la bataille, c’est-à-dire à la mort, à cause de nos remparts démantelés, à cause de nos forts ruinés, dont chaque pierre qui tombe blesse un vivant ou achève un blessé, à cause des enfants sans pères et des veuves à qui elle a pris leurs hommes et à qui elle ne fera pas de rentes en dépit de tous ses décrets ; je ne lui pardonne ni les caisses forcées ni les compagnies de chemins de fer pressurées, ni les titres de l’emprunt vendus à un changeur de Liége ; je la méprise à cause de Clémence qui a été mouchard et je ris d’elle à cause d’Allix qui est fou ; je suis triste quand je songe à deux ou trois intelligences d’élite fourvoyées parmi ses membres, et qu’elle entraîne dans une irrémédiable chute, et je l’abhorre surtout à cause de l’idée qu’elle a représentée un instant, à cause de l’admirable et féconde idée de l’indépendance municipale, à cause de cette juste revendication qu’elle n’a pas su formuler avec honnêteté et clarté, et qui, grâce aux excès qu’elle a commis en son nom, a perdu pour longtemps peut-être toute chance d’estime et de triomphe !

Mais si grande que soit aujourd’hui mon horreur pour la parodie de gouvernement que nous subissons depuis deux mois bientôt entiers, je n’ai pas lu sans un vif sentiment de répulsion lu lettre du citoyen Rossel. Oh ! elle est fort bien faite, cette lettre ; très-nette, très--