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Page:Mendès - Les Oiseaux bleus, 1888.djvu/221

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LES OISEAUX BLEUS

bonne heure ! voilà, bien la chevelure d’or léger que j’aimais si éperdument, que j’aimerai toujours. » Et, plein d’une amère joie, il renouvela, à genoux devant l’image maintenant pareille au cher modèle, ses serments d’éternelle constance. Mais, véritablement, quelque méchant génie devait se jouer de lui : trois jours s’étant passés, il fut obligé de reconnaître que le portrait avait encore subi des détériorations notables. Que voulait dire ceci ? Pourquoi ce front d’ivoire, couleur d’ambre, était-il si haut ? Il avait bonne mémoire, grâce à Dieu ! il était sûr que la reine avait un petit front, rougissant et frais comme les jeunes églantines. En quelques coups de pinceau, il baissa la chevelure dorée, rosa le front, d’un rose clair. Et il se sentait le cœur plein d’une tendresse infinie pour le tableau restauré. Le jour suivant, ce fut pis encore ! Il était évident que les yeux et la bouche du portrait venaient d’être changés par une volonté mystérieuse ou par quelque accident. Jamais la bien-aimée n’avait eu ces prunelles sombres, d’un noir de nuit, ni cette bouche trop ouverte, qui mon-