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Page:Mendès - Les Oiseaux bleus, 1888.djvu/23

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LES OISEAUX BLEUS

— Une autre fois, tu répondras plus vite. Tiens, regarde, là, devant nous, ces gens qui viennent. Allons, dépêche-toi.

L’enfant s’approcha d’une famille bourgeoise qui courait presque, dans la pluie, en quête d’une voiture ; et, tendant une main, d’une voix faussement pleurarde :

— Messieurs, mesdames, geignit-elle, nous sommes cinq enfants à la maison. Papa est sans ouvrage. Donnez-moi quelque chose. Ça vous portera bonheur !

On lui donna une pièce de deux sous, que, les gens passés, elle remit à sa mère.

— Bête ! dit celle-ci, il fallait courir après eux, ils t’auraient donné davantage.

Et elle lui flanqua une autre gifle. La petite fondit en larmes. Elle ne devait pas avoir plus de sept ou huit ans. Elle avait, si maigre, sous le jour des illuminations, une pâleur presque morte, avec des taches de rousseur qui avaient l’air de taches de boue. Et elle pleurait avec de courts sanglots. Puis, elle se remit à marcher devant ce hideux couple, ne pleurant plus, la main dans son corsage. On eût dit que