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Page:Mercier - Néologie, 1801, tome I.djvu/66

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parce qu’ils ont plus d’idées que de mots ; mais leurs mots font tous image. Il me paraît que les langues dites barbares ou naissantes, tendent toutes à abréger les choses confuses, et à faire servir la principale circonstance d’une action à en représenter la totalité. Quelle est la manière la plus aisée et la plus naturelle d’enregistrer leurs conceptions, si ce n’est celle de parler par images ? Je sais que les idées abstraites ne peuvent être toutes exprimées par ce langage ; mais il y a peu d’idées abstraites véritablement nécessaires pour aborder les grandes vérités morales[1].

Si le langage est un présent fait à l’homme par la Divinité, que dirons-nous de l’invention de l’Alphabet, si ingénieuse, si profonde, si admirable qu’elle ne peut s’expliquer que par les idées innées, que par une émanation divine, est Deus in nobis ?

  1. Quand on a des observations subtiles à faire, on ne saurait employer trop d’images. Il serait aisé de prouver que le style figuré est toujours le plus clair et le plus précis. Ôtez l’imagination, l’esprit humain ne vole plus ; il se traîne à pas lents sur les objets, et ternit tout ce qu’il touche. (Rivarol)