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Page:Mercier - Néologie, 1801, tome I.djvu/74

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( lxii )

J’aperçois telle révolution heureuse attachée à un mot neuf. Qui ne sent pas que les hommes, un jour, se rallieront à quelques axiomes d’une grande simplicité et d’un parfait laconisme ; le décalogue est le plus haut travail de la pensée. Toute grande pensée vient de l’auteur de tout bien. On peut méditer long-temps sans obtenir une seule pensée ; mais l’on n’a une bonne pensée que lorsqu’on désire vivement de l’avoir. Si vous ne retirez de votre méditation que des inquiétudes, des tourmens, des doutes obstinés, c’est que vous cherchez de vains fantômes. On nous peint Spinosa comme un petit homme, pâle, maigre, n’ayant que le souffle, à l’œil creux, au visage effilé ; il devait être ainsi. La figure de l’athée est triste et tourmentée. Il affirme et il est dans le doute ; il s’épouvante quelquefois de lui-même ; il tient par orgueil à un système qu’il abandonnerait s’il se trouvait seul sur un rocher nu. Je ne connais rien de plus beau, dans aucun livre, que Robinson Crusoé à genoux, les mains jointes, pontife de son île déserte, adorant Dieu avec ferveur, et sans être vu d’aucun homme.

Penser, parler, écrire, c’est absolument