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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IV, 1782.djvu/261

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tout ce qu’il y a dans le reste de l’Europe, & qu’il est très-inutile de voyager, pour ne voir que des choses inférieures. Aussi ne comprend-on rien dans ce pays à la fantaisie d’un seigneur qui va visiter la Hollande, l’Angleterre, la Suisse, l’Italie, l’Allemagne & la Russie : on l’accuse de bizarrerie.

Ici, chacun se glorifie de l’emploi qu’il exerce, & se croit pour ainsi dire membre de la couronne, pour peu qu’il approche de la botte du monarque ; celui qui met un plat sur une table, s’appelle un gentilhomme, & un porte-manteau prend le titre d’écuyer. Nul n’ose empiéter le moins du monde sur les fonctions de son voisin ; trente ou quarante charges sont exercées dans un dîner ; jusqu’au transport du billot de la cuisine regarde un officier ad hoc. Qui pourroit remonter à l’origine, & suivre la sous-division de ces différens offices, tous acquis à prix d’argent, & soudoyés en conséquence ? Quel gouffre ! Quel œil osera en sonder toute la profondeur ?