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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/143

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fance & la beauté avoient perdu leur charme & leur pouvoir.

Un grand nombre de cadavres resterent sur la place, & aucun d’eux (ce qui est surprenant) n’avoit une fracture. Ils avoient tous été étouffés, & le froissement les avoit déshabillés en partie d’une maniere tout-à-la-fois déplorable & bizarre.

J’ai vu plusieurs personnes languir pendant trente mois des suites de cette presse épouvantable, porter sur leur corps l’empreinte forte des objets qui les avoient comprimés. D’autres ont achevé de mourir au bout de dix années. Cette presse coûta la vie à plus de douze cents infortunés, & je n’exagere point.

Une famille entiere disparut. Point de maison qui n’eût à pleurer un parent ou un ami !

On n’a point su à quelle cause attribuer cet étonnant désastre. Le lieu paroissoit spacieux, & personne ne prévit le danger.

Aucun administrateur ne fut recherché ; tout fut mis sur le compte de la fatalité. Elle