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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/171

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conserver dans les siecles aucune marque distinctive ; il a tué la grandeur & la générosité qui vivent de sacrifices ; il a invité les passions, déjà si terribles, à ne reconnoître aucun frein ; & c’est dans le néant qu’il veut faire descendre avec lui tous les êtres, comme dans les ténebres favorables, sans doute, à le cacher aux yeux de tous & à le dérober à lui-même.

L’athée porte-t-il donc un cœur criminel ? Et s’il ne l’est pas, comment peut-il voir sans frémir le tyran ensanglanté, dormant à côté du paisible & vertueux monarque ? Qu’importeroit alors d’avoir été un Marc-Aurele ou un Caligula ; d’avoir ordonné les sanglantes batailles, ou d’avoir tracé un code humain ? Que deviendroit cette affection tendre & pure qui nous porte vers nos semblables ? Fuyez, gracieuses émotions qui tendez à ramener l’union & la concorde au milieu des êtres sensibles ! Ils ne sont plus faits pour s’aimer, puisque le crime & la vertu n’admettent entr’eux aucune différence.