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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/170

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ronne ; si la vie n’est qu’un assemblage forcé d’élémens prêts à se dissoudre ; si la tombe n’a qu’une profondeur obscure & muette où je dois m’ensevelir pour jamais ? Eh bien, que j’y tombe plutôt aujourd’hui que demain ; que je quitte un monde où il n’y a plus ni espérance, ni consolation, ni appui ; où le pouvoir qui m’a créé ne m’apperçoit seulement pas ; où ma sensibilité est froissée de toutes parts, sans qu’aucune oreille puisse entendre mes cris ni recueillir mes gémissemens ; où la force écrasante s’appellera impunément justice ; où je ne pourrai même lui contester le titre qu’elle usurpe ! Car que devient l’idée de justice, sans un Juge éternel & suprême ? Et que dirois-je au tyran qui, me mettant le pied sur la gorge, me crieroit : tu es foible, & je suis fort ?

Ainsi l’athée a renversé l’ordre qui délectoit mes regards & reposoit mon cœur. Il a porté sur la nature, ainsi que sur lui-même, une main destructive & meurtriere. Il a interdit la vertu à ses semblables, comme ne devant