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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/257

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qu’aux superficies. Deux ou trois idées le dominent puissamment, & il tourne dans ce cercle ; ce qui répand une seule & même couleur sur ses productions. Quand on les lit de suite, on s’apperçoit qu’il n’a jamais changé son premier point de vue. Il est fort instruit ; mais il ne sait pas placer avec fruit cet amas de connoissances : la grace, l’esprit & la malice lui tiennent incessamment lieu de génie.

Rarement éloquent, si ce n’est dans ses belles tragédies, ailleurs il est stérile, lorsqu’il parle morale, & très-borné lorsqu’il traite de matieres politiques. C’est une philosophie commune que celle dont il se pare ; mais il l’a très-bien ornée.

Toujours poëte, (& c’est là son grand titre) presque jamais penseur, ce n’est point la fécondité des idées qui le distingue ; c’est plutôt la variété infinie des tours, & la magie heureuse de ses expressions. Ainsi ces généraux habiles qui n’ont qu’une petite troupe, par des évolutions multipliées & adroites, font passer & repasser tant de fois leurs soldats,