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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VI, 1783.djvu/4

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teur vous tend au coin de chaque rue une brosse officieuse, une main prompte ; il vous met en état de vous présenter chez les hommes en place & chez les dames ; car on passera bien avec l’habit un peu râpé, le linge commun, le mince accommodage ; mais il ne faut pas arriver crotté, fût-on poëte.

C’est sur le Pont-Neuf qu’est la grande manufacture ; on y est mieux décrotté ; on y est plus à son aise, & les voitures qui défilent sans cesse, n’interrompent point l’ouvrage. La célérité, la propreté distinguent ces décrotteurs-là ; ils sont réputés maîtres ; ailleurs vous risquez de rencontrer un apprentif ignare, à qui vous confiez votre jambe, & qui prenant le polissoir au lieu de la vergette, étend sur un bas de soie blanc, une cire noire & gluante que la plus habile blanchisseuse ne pourra effacer. Quel désastre pour celui qui n’a que cette paire de bas de soie blancs, & qui est invité à dîner chez une duchesse, pour lui lire ensuite une petite comédie ou un poëme érotique !