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dans toute sa longueur. La vue était différente, mais il avait la curieuse persuasion — que ses subséquentes observations confirmèrent abondamment — qu’il voyait ce monde étrange étant, lui, demeuré au même endroit, quoiqu’il regardât dans une direction différente. La longue façade du grand édifice, dont il avait vu d’abord le toit, reculait maintenant dans la perspective. Il reconnaissait le toit. Sur le devant de la façade était une terrasse de proportions massives et d’une extraordinaire longueur, et vers le milieu de la terrasse, par intervalles, se trouvaient des mâts immenses, mais très gracieux, qui supportaient de petits objets brillants dans lesquels se reflétait le soleil couchant. L’importance de ces petits objets ne vint à l’idée de M. Cave que quelque temps après, alors qu’il décrivait ce qu’il voyait à M. Wace. La terrasse surplombait un fourré de la plus agréable et luxuriante végétation, au delà duquel se trouvait une large pelouse verdoyante sur laquelle reposaient certaines grandes créatures, en forme de scarabées, mais énormément plus grosses. Au delà de cette pelouse était une chaussée de pierre rosâtre richement décorée, et au delà encore, bordée d’épais roseaux rouges et remontant la vallée exactement parallèle avec les lointains rochers, s’étalait une vaste et miroitante étendue d’eau. L’air semblait plein de bataillons de grands oiseaux manœuvrant en courbes majestueuses et, sur l’autre bord de la rivière, s’élevait une multitude d’édifices, richement colorés et, étincelants de réseaux et de facettes métalliques, au milieu d’une forêt d’arbres moussus et couverts de lichens. Tout à coup, quelque chose sembla fouetter à coups répétés au travers de la vision, comme le battement d’une aile ou d’un