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Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/50

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» M. Henri Rochefort. — Alors, pourquoi donner des juges dévoués à la famille ?

» M. le président Schneider. — Vous mettez en suspicion des juges que vous ne connaissez pas. Je vous invite, quant à présent, à vous renfermer dans votre question. Je ne puis pas permettre autre chose.

» M. Henri Rochefort. — Eh bien ! je me demande, devant un fait comme celui d’hier, devant les faits qui se passent depuis longtemps, si nous sommes en présence des Bonaparte ou des Borgia. (Exclamations ; cris : À l’ordre ! à l’ordre !) J’invite tous les citoyens à s’armer et à se faire justice eux-mêmes.

» Le pleutre Ollivier se hâta de faire signe au président Schneider de clôturer le débat, qui commençait à mettre le feu aux tribunes, et, après avoir demandé la parole, il appela le crime de la veille « l’événement douloureux. » — Dites : « l’assassinat ! » lui cria Raspail. Et le ministre de la justice expliquait que la loi, spécialement faite pour les membres de la famille Bonaparte, et datant de 1852, ne permettait pas de traduire le prince Pierre devant le jury, qui l’eût condamné sans rémission ; que tout ce qu’on pouvait faire était de le déférer à une haute cour dont naturellement on choisirait un à un les jurés, avec promesse pour eux de toutes sortes de faveurs et de décorations en échange d’un verdict d’absolution.

» Et l’Ollivier, après avoir vanté son respect pour l’égalité, terminait par ces menaces à notre adresse :

» — Nous sommes la modération, nous sommes la liberté et, si vous nous y contraignez, nous serons la force.

» Cette levée de baïonnettes avait été reçue par les plus vifs applaudissements de la part de cette majorité qui quelques mois plus tard allait s’effondrer dans la boue, le silence et le remords, au point que les mem-