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Page:Mirbeau - Lettres de ma chaumière.djvu/340

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la basse-cour, et il ne me fit grâce ni d’une vache, ni d’une poule, disant le nom de chaque bête, son prix, ses principales qualités. En traversant le parc, il voulut bien m’apprendre qu’il possédait douze mille chênes de hautes futaies, trente-six mille sapins, vingt-cinq mille neuf cent soixante douze hêtres. Quant aux châtaigniers, il en avait tant, qu’il ne pouvait en savoir le nombre exact. Enfin, nous débouchâmes sur la campagne.

Une grande plaine s’étendait devant nous, rase, sans un brin d’herbe, sans un arbre. La terre, unie comme une route, avait été soigneusement hersée et passée au rouleau ; le vent y soulevait des nuages de poussière qui se tordaient en blondes spirales, et s’échevelaient dans le soleil. Je m’étonnai de n’apercevoir, en plein mois d’août, ni un champ de blé, ni un champ de trèfle…

— Ce sont mes réserves, me dit Lechat… Je vais t’expliquer… Tu comprends, je ne suis pas un agriculteur, moi ; je suis un