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Page:Missions étrangères de Paris - Le catholicisme en Corée, son origine et ses progrès, 1924.pdf/60

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a reçu avec bienveillance nos communications. Sa femme, mère du roi, m’a fait prier secrètement d’écrire à notre ministre à Pékin de venir demander la liberté religieuse. Les grands de la capitale désirent l’arrivée des navires français. Pour moi, je persiste à ne rien faire avant d’avoir conféré avec le régent. Quoique toujours proscrite, notre position est bonne, et je crois que l’an prochain, nous serons encore plus à l’aise ».

Cette lettre était datée du 19 Novembre 1865. Ces espérances devaient être bientôt cruellement déçues, et le charitable évêque ne se doutait pas que 4 mois plus tard, lui, son Coadjuteur et sept des dix missionnaires qu’il était si heureux de posséder tomberaient tour à tour sous le glaive du bourreau. Il ne pouvait pas penser que ces quatre jeunes prêtres qui venaient d’arriver, n’auraient à confesser Jésus-Christ que par le martyre : « Non loquendo, sed moriendo confessi sunt ». Les confrères de Mgr. Berneux n’étaient pas aussi rassurés que lui.

« Le père du jeune roi, écrivait à la même époque Mgr. Daveluy, ne s’est occupé ni de nous, ni de nos chrétiens ; mais combien cela durera-t-il ? Il est d’un caractère violent, cruel, méprisant le peuple, et comptant pour rien la vie des hommes : si jamais il attaque la religion, il le fera d’une manière terrible. »

Combien avait vu juste Mgr. Daveluy en écrivant ces réflexions. Voici, en effet que tout à coup les événements se précipitèrent et réduisirent à néant les belles espérances de Mgr. Berneux. Depuis plusieurs années déjà, les Russes avaient fait en Tartarie d’inquiétants progrès et s’étaient rapprochés de la frontière de Corée, ils touchaient maintenant au fleuve Touman, qui forme la limite nord de la province coréenne du Ham-kieng. En janvier 1866, un navire russe se présenta à Ouen-san, port de commerce sur la mer du Japon, demandant la liberté de commerce et le droit pour les marchands russes de s’établir en Corée. C’est le gouvernement coréen qui fut troublé devant cette exigence. Certains chrétiens de la capitale, convaincus que de la demande des Russes pouvait enfin sortir l’émancipation religieuse de la Corée, écrivirent au régent, pour lui persuader que l’unique moyen d’éloigner leurs puissants voisins était de contracter une alliance avec la France et l’An-