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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/188

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de tous les crimes est celui qui n’atteint pas un individu isolé, mais une nation entière ; celui dont les funestes effets se prolongent de génération en génération, ravissant aux peuples, non des biens que de nouveaux efforts peuvent leur rendre, non cette santé et cette vie du corps qu’il fallait perdre une fois : mais toutes leurs facultés morales et intellectuelles, mais la dignité humaine, mais la vigueur et la vie de l’âme. Ce crime, don Alonzo, est celui de tous ceux qui servent la tyrannie.

— Que me restera-t-il donc ici-bas ? répartit le mulâtre ébranlé.

— Le témoignage de votre conscience et l’estime des gens de bien.

Don Alonzo se leva et se promena à grands pas dans la salle, sans prononcer un seul mot. — Demain, dit-il enfin, demain, je vous répondrai. Déjà la moitié de la nuit est écoulée ; cher hôte, vous devez avoir besoin de repos.

Après avoir ainsi parlé, il conduisit le Flamand dans une autre chambre, où se trouvait un lit d’une magnificence extraordinaire. — Vous dormirez paisiblement, lui dit-il, car vous avez fait aujourd’hui une bonne action… Pour moi, des réflexions bien douloureuses vont me priver du sommeil.