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Page:Monselet - Fréron, 1864.djvu/115

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Fréron est le critique froid, compassé, exagérant le goût jusqu’à la sécheresse, le rhéteur, le peseur juré de diphthongues. L’ironie ! l’ironie ! il n’a eu que cela, mais il l’a bien eue.

Il était trop habile pour ne pas mettre un éloge à côté de ses blâmes. Il a beaucoup vanté certaines parties de la Nouvelle Héloïse, il a recommandé le Père de famille, il a admiré Buffon, il a même compris Shakespeare. Enfin j’ajouterai, — et c’est en moi le résultat d’un examen approfondi, — que Voltaire n’a jamais été mieux apprécié et loué que par Fréron, c’est-à-dire avec plus de discernement, de tact et de justice. Et tout cela a été impuissant à protéger Fréron contre son siècle. Ah ! je conçois que le tableau de cette existence harcelée, calomniée, souffletée, emprisonnée et empoisonnée, ait arraché à Mairobert les réflexions suivantes, cri de l’honnêteté et de la rébellion, souffle d’une poitrine qui veut de l’air avant tout : « En apprenant ces atteintes multipliées à la liberté d’un citoyen, si j’ai été indigné, milord, du despotisme