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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/36

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LES RESSUSCITÉS

sent aussi avares de paroles que le reste de la physionomie semble riche de pensées. En résumé, c’est une tête d’un beau style, pleine de noblesse et d’observation. Ce grand air d’aristocratie qui prédomine et doit plus tard se refléter dans ses œuvres ne peut évidemment appartenir qu’à un écrivain de la famille galonnée des Montesquieu et des Buffon.

Il avait alors vingt ans. Quand il entra dans Paris, le fameux xviiie siècle, gorgé de folies et de crimes, allait rendre le peu qu’il avait d’âme. Chateaubriand assista aux derniers débattements du monstre sur le sable doré de la cour.

On allait chaudement en besogne de vice. Sentant que la mort la tirait par la jambe, la noblesse se dépêchait à boire la joie et le luxe à double tasse. Chaque jour amenait son extravagance nouvelle.

Notre jeune et fier Breton passa brutalement à travers les toiles galantes des araignées de l’Opéra, sans y laisser ailes ni pattes. Tout le monde se rangea devant son amour ignoré ; et par-dessus les haies de Trianon il put regarder, sans danger pour son cœur, les