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LETTRES FAMILIÈRES.

L’immobile Monsieur Jacob a volé sur les ailes de l’amour, depuis Gratz jusqu’ici, sans se reposer un moment. Il a fait le premier jour son entrée publique, et le beau sexe lui a tellement fait les honneurs de la ville qu’il songe déjà à y établir sa demeure. Pour moi, qui suis convaincu que je trouverai des catins d’un bout de la terre à l’autre, et que je ne puis manquer que de besoins, je quitterai Venise dans une quinzaine de jours ; et je vous avoue que je suis dans une véritable colère contre les barqueroles qui, trompés sans doute par mon air robuste, veulent m’arrêter à toutes les portes où il y a des p…… et branlent la tête lorsque je les fais passer plus avant, comme si c’étoit ma faute.

Monsieur l’Ambassadeur de France est le seul ministre qui tienne table à Venise, et il fait, dit-on, cet honneur à son maître à très-bon marché.

J’ai l’honneur de vous saluer, Mylord. J’ai peur que le plaisir que j’ai eu avec vous ne me fasse tort pour le reste de mon voyage. Je vous demande toujours la continuation et l’honneur de votre amitié, et d’agréer le respect et l’attachement avec lequel je serai toute ma vie, mylord, votre très-humble et très-obéissant serviteur.


Montesquieu.


Agréez, Mylord, que j’assure ici de mes respects la quadruple alliance et MM. de Breil et de Solar. Je compte écrire à M. de Breil par ce courrier, ou le prochain. Je voudrois bien aussi que vous eussiez la bonté de parler de moi à M. le comte de Paroca, s’il est arrivé.

Je vous supplie, Mylord, de vouloir bien envoyer à la