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Page:Montesquieu - Deux opuscules, éd. Montesquieu, 1891.djvu/30

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MONTESQUIEU

autrefois, c’est-à-dire, que les guerres sont moins décisives. J’en donnerai une raison bien extraordinaire, c’est que les gens de pied n’ont plus d’armes défensives ; autrefois ils en avoient de si pesantes, que, quand l’Armée étoit battue, ils les jettoient d’abord[1] pour se sauver[2] : aussi voit-on dans les Histoires des fuites, & non pas des retraites. Dans le combat l’armure légère étoit livrée à la boucherie, aux pesamment armés ; dans la défaite les pesamment armés étoient exterminés par l’armure légère.

V

Les desseins qui ont besoin de beaucoup de tems pour être exécutés ne réussissent presque jamais, l’inconstance de la fortune, la mobilité des esprits, la variété des passions, le changement continuel des circonstances, la différence des causes font naître mille obstacles.

Les Monarchies ont sur-tout ce desavantage qu’on s’y gouverne tantôt par les vuës du Bien public, tantôt par des vues particulières, & qu’on y suit tour à tour les intérêts des Favoris, des Ministres & des Rois.

  1. Voyez toute l’Histoire de Tite-Live. (M.)
  2. Montesquieu a ajouté : « ou ils restoient sans défense. »