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Page:Montesquieu - Deux opuscules, éd. Montesquieu, 1891.djvu/69

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Florus, plus grand après ses disgrâces, car sa prison, sa fuite, son exil avaient jeté sur sa dignité une espèce d’horreur sacrée : carcer, catenœ, fuga, exilium horrificaverant dignitatem.

L’histoire conserve avec bien plus de soin la mémoire des grandes catastrophes que celle des règnes heureux et tranquilles ; la fable même a toujours signalé ses héros par quelques revers ; l’homme n’est que haut dans la prospérité, mais il est grand dans l’adversité.

Mais, comme la plupart des hommes ne sont pas dans un état assez élevé pour être outragés de la fortune, ils ont la retraite, qui souvent fait en leur faveur l’effet de la disgrâce.

Un grand homme de notre siècle se retira bien à propos, c’était le lendemain d’une belle action, et il sut donner à ce trait de vertu un motif plus vertueux encore. Mais le monde est une carrière qu’il est difficile de bien commencer et de bien finir ; l’expérience nous manque pour l’un, souvent elle nous nuit pour l’autre.

D’ailleurs une infinité de gens par leur vie passée se sont ôté la ressource d’une belle retraite, elle ne serait plus regardée que comme le désespoir d’un homme accablé du souvenir de ses dérèglements ou de ses disgrâces, ce qui n’a rien de noble en lui-même.

Une chose bien nécessaire pour bien soutenir sa réputation, c’est de bien connaître le génie de