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Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/90

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objet de la nature, comme une montagne ou un océan dont les aspects varient avec les points de vue — que ce divin poëme d’ÉIoa, outre tant de sens que le temps n’a pas fanés, avait encore, à sa date, la signification d’une haute satire de ces incohérentes théories qui donnaient au grotesque et au monstrueux accès dans l’Art ? L’amour d’Éloa pour le Maudit n’est-ce pas cette impossible alliance qu’on rêvait alors de la Beauté et de la Laideur ? Alliance impossible et condamnée, puisqu’Éloa, pour avoir voulu régénérer le Prince du Mal, se perd avec lui sans l’avoir même consolé. — Il n’en est pas moins vrai que ces théories bruyantes, qui n’étaient point la principale affaire de l’innovation romantique mais qui en furent l’excès nécessaire, lui donnèrent sa couleur, lui servirent d’Évangile : faux évangile et couleur fausse qui lui venaient évidemment des doctrines de la Révolution, ces doctrines de révolte que les victoires de Napoléon imposaient au monde vaincu, comme Mahomet fit le triomphe du Koran, par le sabre.

Nous allons voir qu’un plan très rationnel semble avoir dirigé ce soin successif de l’humanité moderne de s’étudier d’abord dans sa pensée, puis dans son sentiment et son attitude, puis dans sa constitution physiologique et dans sa sensation. Pour l’instant, il nous suffit d’acquérir cette double affirmation prouvée : 1° que la corrélation des évolutions politiques et des évolutions artistiques