Aller au contenu

Page:Moselli - La Fin d'Illa, 1925.djvu/159

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fièrent. Ma peau s’épaissit. Je souffris moins des coups de fouet et d’aiguillon. Un indéfinissable espoir s’infiltra dans mon cerveau affaibli.

Et, comme, au cours d’une période de repos, un de mes camarades de misère, un énorme homme-singe qui couchait à mon côté, et que l’on appelait Ouh, m’avait renversé dans l’étable pour s’amuser à mes dépens, j’appelai à moi toute mon ancienne fierté et, d’un formidable coup de poing au bon endroit, à la pointe du menton, l’étendis à mes pieds.

Poussant des grognements farouches, plusieurs de ses congénères firent mine de se ruer sur moi. Je me crus perdu.

Quels que fussent mes sentiments — et, en réalité, je n’étais guère rassuré — je ne les montrai pas ; la tête haute, je regardai mes ennemis bien en face. Pendant une longue seconde, ma volonté et celle des hommes-singes s’affrontèrent. Et les brutes, domptées, baissèrent les paupières. Des siècles d’asservissement les avaient habitués à l’obéissance. Ce n’était pas en vain que leurs pères et les pères de leurs pères avaient vécu comme des esclaves. Esclaves, ils l’étaient, d’âme et de corps.

Ouh se releva et, soumis, me prit la main dans les siennes et l’appuya contre son cœur qui