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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/242

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absence, à des heures, où la plupart du temps, au péril de ma vie, je me trouvais loin de ma caisse, sans aucun moyen de contrôle en mon pouvoir, et obligé de confier mes clefs et mes livres à un subalterne ; en exigeant que pendant que je travaillais à droite je fusse tenu de travailler à gauche, simultanément ; en passant par toutes ces fourches caudines, je n’aurais été coupable que de négligence, et non d’infidélité.

En outre, à cette époque, et plus d’un exemple en témoignait, le Gouvernement se rendait bien compte des difficultés de la situation ; il comprenait tout le mal que se donnaient ses fonctionnaires, à Sumatra, et il avait presque érigé en principe, de ne pas regarder leurs comptes de trop près. On se contentait d’exiger que les fonctionnaires compromis payassent le déficit, et encore fallait-il des preuves bien certaines pour mettre en avant l’accusation d’infidélité, ou seulement pour en avoir l’idée. Tout cela était tellement posé en principe, et en règle générale, que je ne m’étais pas gêné, à Natal, pour dire au Gouverneur, que, vérification faite de mes comptes dans les bureaux de Padang, j’appréhendais fort d’avoir un supplément considérable à payer ; ce à quoi il avait répondu, en haussant les épaules : » Oh !… ces questions d’argent !… » comme s’il eut parfaitement reconnu, lui-même, que l’accessoire devait passer après le principal.

J’avoue, cependant, que les questions d’argent ont parfois leur importance. Mais, dans le cas présent, malgré leur importance, elles étaient subordonnées à d’autres intérêts, et à d’autres occupations. Il est évident que si, par inexactitude ou par négligence, il manquait quelques milliers de francs dans ma