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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/275

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dant. Il y avait, surtout parmi les officiers de la garnison, un certain nombre de flagorneurs, et de matamores, sachant que le général approuvait assez les duels, et en particulier les duels avec quelqu’un en disgrâce comme je l’étais. On excitait ma sensibilité, à dessein. Aussi, parfois m’arriva-t-il d’aller sur le terrain pour le compte d’un malheureux, hors d’état de se défendre, et que je croyais lésé dans ses intérêts.

Quoiqu’il en fût, le duel était à l’ordre du jour ; et plus d’une fois il s’est trouvé que j’avais deux affaires sur les bras, dans la même matinée. Il y a quelque chose de très attrayant, dans le duel où l’on se sert du sabre, ou dans le duel au sabre, comme on dit, je ne sais guère pourquoi.

Vous comprenez, pourtant, qu’aujourd’hui, je ne me battrais plus si facilement, y eût-il même des motifs de rencontre aussi graves que ceux dont je viens de vous parler. Viens un peu ici, Max… allons, laisse cette pauvre petite bête tranquille… viens ici ? Ecoute, mon enfant, il ne faut jamais attraper des papillons. Ces petites bêtes-là ont rampé ou grimpé bien long-temps, le long des arbres, alors qu’elles n’étaient que des chenilles. Cette vie-là n’est pas bien gaie ! Maintenant, il vient de leur pousser des ailes, et leur seul plaisir est de voleter pat-ci par-là, de s’amuser et de chercher leur nourriture dans les fleurs, ce qui ne fait de mal à personne… Regarde ! n’est-ce pas bien plus gracieux de les voir voltiger comme ça ?

Ainsi, de fil en aiguille, on passa des duellistes aux papillons ; la conversation traita de la compassion que tout honnête homme doit avoir pour les animaux, de la loi Grammont, de l’assemblée na-