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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/30

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là. Ils me poussaient. Il me fallut bien aller de l’avant. Peu après, sans savoir comment, je me trouvai devant la baraque. Je ne voyais plus rien, pas plus la fille que le reste. Tout dansait devant moi. Je me mis à bégayer un passé indéfini de je ne sais plus quel verbe grec…

— Plaît-il ? fit-elle.

Je me remis tant soit peu, et je continuai avec le premier vers de l’Iliade :

Meenin aeide thea… (Chante, déesse, la colère) et… que l’Egypte était un don du Nil…

Je suis convaincu, que, j’aurais fini par entrer en conversation avec elle, si, à ce moment, un de mes camarades, plus espiègle que les autres, ne m’avait donné, dans le dos, un coup si violent que j’allai m’aplatir sur la devanture de l’étalage. Cette devanture, à mi-hauteur d’homme, servait de fermeture à la baraque. Je sentis un poignet de fer me saisir au collet… un autre poignet m’empoigna beaucoup plus bas… je me balançai dans l’air, un instant, et avant de bien me rendre compte de ce qui se passait, je me trouvai dans la baraque du Grec. Alors, une voix qui s’exprimait en français, de la façon la plus intelligible, s’écria : « Ah ! gamin ! attends ! Je vais appeler la police ! » En ce moment-là, je me trouvais bien près de la belle fille, mais cela ne me faisait pas le moindre plaisir. Plein de trouble et de frayeur, je pleurais et je demandais pardon ; mais, inutilement. Le Grec me tenait par le bras et me flanquait des coups de pied. Je cherchais mes camarades… je les appelais !… le matin même nous nous étions beaucoup occupés d’un Scévola qui avait mis la main dans un brasier, et dans nos thèmes