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Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/62

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LE CERVIN

pensé à la fixer, le seul morceau de roc de nature à se prêter à cet usage étant trop rond pour que l’on puisse aisément y attacher l’anneau de corde. Pendant ces instants j’eus le temps d’explorer notre corniche qui serpentait comme un sentier vers l’arête Sud, épousant toutes les sinuosités de la montagne. Elle se trouvait entièrement dégarnie de glace et de neige, et, en l état actuel, aurait pu être facilement traversée. Je rencontrai aussi, fiché dans le roc, un crampon profondément rouillé, une relique, je pense, de l’ascension de M. Grove en 1867[1]. Après avoir fait couler la corde à nous, nous trouvons le reste de la corniche en condition très différente. Au lieu d’offrir au pied de bonnes saillies sur le roc, elle était garnie de neige folle, et les quelques protubérances qui en sortaient étaient verglassées, et, pour la plupart, brisées. Ces difficultés ne sont, heureusement, pas longues et nous pouvons bientôt plonger dans la neige qui recouvre l’arête (12 h. 50 soir). Petrus, qui tout le long du jour passe son temps à errer en avant de nous, a disparu. Nous suivons ses traces, parfois sur l’arête, mais le plus souvent sur la pente abrupte de gauche, et en trois quarts d’heure nous le rejoignons sur le sommet (1 h. 45 soir). Le jour était parfaitement calme et la vue sans nuages. Le temps fuyait rapidement, et, quand Burgener vint me mettre à la corde à 2 h. 30 soir, j’eus beaucoup de peine à me figurer que nous avions passé là trois bons quarts d’heure.

Nous descendîmes alors l’arête Nord-Est, drapée de câbles, jusqu’à l’Épaule où nous attendîmes quelques minutes pour examiner la caravane Penhall qui arrivait précisément en vue sur l’Arête de Zmutt. Après un jodel

  1. Voy. Alpine Journal, IV, p. 185 : Ascensions Nord et Sud du Cervin, par F. G. Grave. — M. P.