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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/236

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Spark.

Ce que tu dis là ferait rire bien des gens ; moi, cela me fait frémir : c’est l’histoire du siècle entier. L’éternité est une grande aire, d’où tous les siècles, comme de jeunes aiglons, se sont envolés tour à tour pour traverser le ciel et disparaître ; le nôtre est arrivé à son tour au bord du nid ; mais on lui a coupé les ailes, et il attend la mort en regardant l’espace dans lequel il ne peut s’élancer.

Fantasio, chantant.

Tu m’appelles ta vie, appelle-moi ton âme,
Car l’âme est immortelle, et la vie est un jour.

Connais-tu une plus divine romance que celle-là, Spark ? C’est une romance portugaise. Elle ne m’est jamais venue à l’esprit sans me donner envie d’aimer quelqu’un.

Spark.

Qui, par exemple ?

Fantasio.

Qui ? je n’en sais rien ; quelque belle fille toute ronde comme les femmes de Miéris ; quelque chose de doux comme le vent d’ouest, de pâle comme les rayons de la lune ; quelque chose de pensif comme ces petites servantes d’auberge des tableaux flamands qui donnent le coup de l’étrier à un voyageur à larges bottes, droit comme un piquet sur un grand cheval blanc. Quelle belle chose que le coup de l’étrier ! une jeune femme sur le pas de