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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/237

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sa porte, le feu allumé qu’on aperçoit au fond de la chambre, le souper préparé, les enfants endormis ; toute la tranquillité de la vie paisible et contemplative dans un coin du tableau ! et là l’homme encore haletant, mais ferme sur sa selle, ayant fait vingt lieues, en ayant trente à faire ; une gorgée d’eau-de-vie, et adieu. La nuit est profonde là-bas, le temps menaçant, la forêt dangereuse ; la bonne femme le suit des yeux une minute, puis elle laisse tomber, en retournant à son feu, cette sublime aumône du pauvre : Que Dieu le protège !

Spark.

Si tu étais amoureux, Henri, tu serais le plus heureux des hommes.

Fantasio.

L’amour n’existe plus, mon cher ami. La religion, sa nourrice, a les mamelles pendantes comme une vieille bourse au fond de laquelle il y a un gros sou. L’amour est une hostie qu’il faut briser en deux au pied d’un autel et avaler ensemble dans un baiser ; il n’y a plus d’autel, il n’y a plus d’amour. Vive la nature ! il y a encore du vin.

Il boit.
Spark.

Tu vas te griser.

Fantasio.

Je vais me griser, tu l’as dit.

Spark.

Il est un peu tard pour cela.