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80 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

partir, un vide s'était du moins comblé dans mon cœur. Pour un ami que j'avais perdu, je venais de trouver une amie, et l'amitié féminine était, je l'apprenais, plus douce.

XXI

Au début du printemps suivant, on découvrit que deux des marronniers qui sous la terrasse de M. Davèzieux avaient donné les plus belles espérances, étaient morts. Cela parut d'autant plus louche que par une coïncidence singulière ces deux arbres étaient précisément ceux qui dans l'avenir devaient couper à nos voisins le meilleur de la vue. Et là-dessus les esprits de trotter ! Les marronniers avaient-ils péri de mort naturelle? Ou bien les avait-on assassinés ? Les Davèzieux (on se rappelait certaines de leurs menaces) étaient parfaitement capable d'avoir exercé sur eux quelque basse vengeance.

Mon père, de qui la santé avait donné tout l'hiver de vives inquiétudes, se mit dans un état épouvantable, et qui ressortait beaucoup plus à la maladie qu'à une légitime colère. On eût dit vraiment que l'on s'était attaqué à la vie de l'un de ses proches. Il se rappela que, lors de la plantation, Victor, le jardinier, avait émis quelques objections, objections qui à vrai dire avaient trait au dommage que des arbres causeraient aux espaliers; mais cela lui suffit pour accuser sans preuve aucune l'homme d'avoir servi les desseins criminels de M. Davè- zieux, et il le cassa aux gages.

Or, à peu de temps de là, M. Servonnet, de passage en ville, s'arrêta à la maison, et raconta que M. de Chaberton venait d'engager Victor à son service. De la

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