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Page:Nantel - À la hache, 1932.djvu/19

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LES VALADE

qui viendront tantôt étirer la mousseline de leurs ailes au-dessus du bassin.

Qui ne serait pas heureux, seul avec lui-même, entouré et confondu, pour ainsi dire, avec cette nature vierge ?

Je m’étends sur le gazon, face au ciel. Mon regard se perd dans la peluche bleue, tendue par les crochets d’argent des premiers rayons.

Pitou, l’un des chiens du Dépôt, vient se coucher près de moi. Sa toison ocre se tache d’encre de Chine. Il me regarde avec ses bonnes prunelles en chocolat. Son museau est humide. Il l’essuie entre ses jambes, nez retroussé, cherchant des puces.

Almanzar l’épicier sort du bois, près de moi, avec une demi-douzaine de lièvres, trouvés bêtement dans ses collets en fil de cuivre, au milieu des routes de la savane, battues pendant les gambades sous la lune.

En m’apercevant, il s’écrie :

— Un fricot pour à souaire. Ça sera bon, avec ane truite, de l’oignon, ane brique de lard et pis un brin de canelle… On s’emplira comme des salauds.

— Je dirai au cuisinier d’ouvrir une boîte de tomates, pour compléter le fricot.

— C’est ça, c’est ça.

Depuis quelques minutes, Almanzar regar-