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Page:Nerciat - Le Diable au corps, 1803.djvu/362

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LE DIABLE AU CORPS.


quel il fut impossible de remédier efficacement : un mois après son duel honorable mon pauvre frere expira.

(Pendant ce récit, Belamour s’est insensiblement attristé jusqu’aux larmes : la petite Comtesse elle-même, qui avait infiniment aimé son frere, comme on le verra par la suite, a besoin de s’essuyer les yeux. La Marquise a suivi dans la glace tous les mouvemens de la physionomie de Belamour ; elle n’a pas remarqué sans une extrême satisfaction combien cette honnête créature a le cœur sensible. Elle l’en aime encore davantage. C’est d’attendrissement qu’elle pleure à son tour. Voilà donc, pour une histoire malheureuse, trois des plus foux personnages du monde, métamorphosés en élégiaques ! Mais ce deuil ne peut pas être long. — Après quelques momens de silence, c’est la Marquise, moins douloureusement affectée, comme de raison, qui cherche la premiere à renouer l’entretien.

LA MARQUISE.

Nous faisons ici, tous trois, une assez triste figure ! Quant à moi pourtant, semblable à ce paysan qui assistait à un sermon sur la passion, où tout le monde pleurait, excepté lui, j’aurais pu dire : « Pourquoi pleurerais-je moi, qui ne suis pas de la paroisse ! » Mais, quoique votre infortuné Baron ne m’ait été de rien, j’ai eu la bêtise, je crois, de le pleurer aussi ! En vérité, c’est à mourir de rire !

LA COMTESSE, assez gaiement.

Je ne sais pas, en effet, d’où m’est venue

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