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Page:Nerciat - Le Diable au corps, 1803.djvu/486

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LE DIABLE AU CORPS.


conquêtes bien moins faciles que celle d’un affamé de capucin. Un seul regard que, sans y penser, la Séraphine laissa tomber sur les Séraphiques pénaillons[1], fut une flèche enduite de feu grégeois qui, dans le cœur du profès, ouvrit un profond stigmate. Le novice ne fut, sans doute, garanti d’une semblable blessure que par le soin modeste qu’il avait pris de tenir les yeux baissés ; mais le caprice, qui veut de préférence tout ce qu’il y a de plus bizarre, destinait encore, dans cette rencontre, un rôle au petit frere lai : sa jeunesse, sa fraîcheur, un visage régulier, quoiqu’un peu mouton, l’avaient fait remarquer. Il était venu soudain, et très-involontairement, à la Marquise, l’idée qu’avec une jolie figure et certain air antimonacal, on était bien malheureux d’avoir… été forcé peut-être ? à se faire capucin. Développer ainsi la pensée d’une Dame que nous connaissons si bien, c’est établir assez les vues qui lui firent accueillir les quêteurs avec bonté ; leur donner audience dans le vestibule ; les questionner, les gratifier d’un louis ; et, plus que tout cela, les engager à venir de tems en tems lui rappeller les besoins de la capuciniere.

  1. Il semble que le Docteur veuille ici faire une double allusion au respect que les capucins ont pour l’ordre des Séraphins en particulier. Le fondateur de la capucinerie est distingué des autres saints de son nom par le titre de Séraphique : l’idée d’un Séraphin (d’une Séraphine à plus forte raison) est donc pour un capucin celle du beau par excellence. (Note des Éditeurs.)