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Page:Nichault - Anatole.djvu/79

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tous ceux qui s’y trouvaient. Un vieux préjugé d’éducation avait persuadé au commandeur, qu’en général il faut être reconnaissant envers les personnes qu’on reçoit ; car il est rare qu’elles ne fassent point un sacrifice en quittant leur maison, même pour s’amuser dans celle d’un autre. D’ailleurs il prétendait que la manière de recevoir plus ou moins bien les gens étant toujours un aveu des sentiments d’estime qu’on leur portait, ils avaient le droit de se blesser d’une distraction, ou de se venger d’une impolitesse.

En entrant dans le salon, Valentine était vivement émue ; son premier regard n’avait osé s’arrêter particulièrement sur personne, et ce ne fut que longtemps après qu’elle put vérifier que son espérance était vaine. La réunion n’était pas nombreuse : madame de Réthel, nièce de M. de Saint-Albert en faisait les honneurs ; elle paraissait fort occupée du soin d’observer Valentine, et plus encore de lui témoigner la préférence la plus flatteuse. Le chevalier, à qui le trouble de madame de Saverny n’avait point échappé, en éprouvait une joie d’amour-propre qui se décelait dans tous ses discours. Il s’empressa de venir lui dire :

— Sur lequel de tous ces visages placeriez-vous l’esprit ingénieux de Lavater ?

— Je voudrais, répondit-elle, en désignant quelqu’un, que cette figure, dont l’expression est si noble et si calme, fût celle d’un philosophe.