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Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/264

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mon dernier embrassement. Pourtant j’ai revu les côtes de France, je ne suis plus qu’à deux cents lieues de toi ; mais la fièvre, qui a déjà enlevé tant des nôtres, va plus vite que le courrier qui te portera cette lettre, et j’ai peur qu’il n’arrive trop tard… Il me reste peu de forces et je veux les employer à me justifier des accusations qui remplissent la seule lettre que j’aie reçue de toi pendant cette longue absence,

» Je me suis fait suivre par madame de Cérolle, dis-tu ? Ah ! mon ami, quelle infâme supposition ! Désolé de l’avoir rencontrée à quelque distance de Marseille, où sa voiture venait de se briser, je n’ai pu lui refuser de la conduire jusqu’à son auberge. Là, elle m’a fait une scène de roman, entremêlée des plus folles menaces, si je m’opposais à ce qu’elle s’embarquât le lendemain sur le bâtiment qui devait me mener à Livourne. Comme elle parlait d’aller trouver le duc de L… et de faire un bruit scandaleux à Paris, je pensai à l’en éloigner, me promettant bien de la laisser à Livourne. En effet j’en suis parti sans qu’elle le sût, et depuis je n’ai plus entendu parler d’elle.

» Débarqué à Modon, je me suis rendu chez notre général en chef ; il m’a confié plusieurs missions que j’ai remplies de mon mieux. Dans l’une d’elles, j’ai eu l’occasion de sauver de la brutalité d’une horde d’Albanais un jeune Grec et sa famille ; je n’avais pour les défendre qu’un petit nombre d’hommes avec moi ; ils firent tous des prodiges de courage, et grâce à eux, je