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Page:Niemcewicz - Notes sur ma captivité à Saint-Pétersbourg.djvu/134

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INTERROGATOIRE.

trement. Et pourquoi ne le nommerais-je pas ici ? il n’y a pas moins de justice et peut-être même de plaisir à rendre hommage à la vérité, qu’à démasquer l’hypocrisie et le vice. Cet homme s’appelle Deboli. Descendu d’une très bonne maison de France, établie en Pologne depuis au moins deux siècles, il avait reçu son éducation dans l’école militaire de Varsovie. Depuis plus de vingt ans, il était ministre de Pologne à Pétersbourg ; faible, souple et rampant, il représentait un roi esclave avec toute la bassesse convenable. Il épousa une Russe ; mais l’impératrice ne l’en distingua pas plus pour cela. Dévoué à Stanislas, il suivait aveuglément toutes les oscillations de son caractère incertain et pusillanime. Dans le cours de la diète de quatre ans, à peine le roi avait-il accepté la constitution du 3 mai 1791 et prononcé quelques discours remplis d’énergie et de patriotisme, que Debolidevint aussitôt ministre zélé et actif. Ses dépêches, quoique écrites d’un style confus et obscur, étaient remplies d’informations sûres et d’avis salutaires. Il fit tant pour se distinguer par son patriotisme, que lorsqu’en 1792 le roi eut abandonné lâchement la cause nationale, les Russes, en foulant aux pieds toutes les convenances, chassèrent son ministre de Pétersbourg, sans lui accorder seulement une audience de congé. Revenu à Varsovie à l’époque de