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HUMAIN, TROP HUMAIN


dit le torrent enflammé de la foi en des vérités dernières définitives ; c’est par le christianisme surtout qu’il est devenu si furieux.

245.

Fonte de la civilisation. — La civilisation est née comme une cloche, à l’intérieur d’un manteau de matière plus grossière, plus commune, fausseté, violence, extension illimitée de tout Moi individuel, de tous peuples individuels, formaient ce manteau. Est-il temps de l’ôter aujourd’hui ? L’élément liquide s’est-il figé, les bons instincts utiles, les habitudes de la conscience noble sont-ils devenus si assurés et si généraux qu’on n’ait plus besoin d’aucun emprunt à la métaphysique et aux erreurs des religions, d’aucunes duretés ni violences comme des plus puissants liens entre homme et homme, peuple et peuple ? — Pour répondre à cette question, aucun signe de tête d’un Dieu ne peut nous en servir : c’est notre propre conception qui doit en décider. Le gouvernement de la terre en somme doit être pris en main par l’homme lui-même, c’est son « omniscience » qui doit veiller d’un œil pénétrant sur la destinée ultérieure de la civilisation.

246.

Les cyclopes de la civilisation. — Celui qui voit ces bassins ravinés où des glaciers se sont établis