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Page:Nietzsche - Richard Wagner à Bayreuth (trad. Baumgartner).djvu/146

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oublier qu’aucun des drames de Wagner n’est destiné à être lu, et que l’on ne peut en conséquence exiger de lui ce qu’on serait en droit d’attendre du drame parlé. Celui-ci demande à agir sur le sentiment par les seuls moyens des idées et des mots, et cette destination le soumet aux lois de la rhétorique. Mais dans la vie réelle la passion est rarement éloquente ; dans le drame parlé elle est forcée de l’être pour se manifester d’une manière quelconque. Mais lorsqu’une langue est déjà jusqu’à un certain point usée et déchue, le dramatiste éprouve le besoin de colorer et de façonner la langue et les pensées d’une manière toute particulière ; il veut relever la langue pour que de son côté elle fasse ressortir l’élévation du sentiment, et il s’expose ainsi à ne pas être compris du tout. Il cherche de même à rehausser là passion par des sentences et des saillies sublimes, et tombe par là dans un autre