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Page:Nietzsche - Richard Wagner à Bayreuth (trad. Baumgartner).djvu/176

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veut sauver la vie de l’enfant qu’elle porte dans son sein, et non la sienne ; il vit comme Sieglinde „pour l’amour de l’Amour“.

Car en effet c’est bien une vie de tourments et de honte que d’être errant et étranger dans un monde comme le nôtre, et pourtant obligé de lui parler et de lui demander quelque chose ; que de le mépriser et de ne pouvoir pourtant pas se passer de ce méprisé, — c’est là la misère particulière de l’artiste de l’avenir, de celui qui ne peut pas, comme le philosophe, s’adonner seul dans une sombre retraite à la recherche de la science ; car il a besoin d’âmes humaines comme médiatrices entre lui et l’avenir ; il a besoin d’institutions publiques comme garanties de cet avenir, comme ponts entre à présent et plus tard. Son art ne peut pas être confié, comme celui du philosophe, à la nacelle de la tradition écrite ; l’art veut être transmis par des facultés vivantes et non par