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Page:Notice historique sur les ouvrages et la vie de Cuvier.djvu/134

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Nous avons déjà dit que M. Cuvier avait fait une grande sensation dès les premiers momens de son séjour à Paris, par la lecture de ses mémoires sur l’histoire naturelle systématique et sur l’anatomie comparée, et par ses enseignemens au Jardin des plantes et à l’école centrale du Panthéon. Sa réputation comme savant naturaliste fut promptement des plus brillantes. À peine avait-il paru sur ce théâtre de gloire, où il devait jouer le premier rôle pendant près de quarante années, qu’il sut s’y placer au rang le plus élevé, et cela sans obstacle, sans que cette place lui fût sérieusement disputée par aucun de ses célèbres collègues ; ce qu’on doit attribuer principalement à l’empire que le caractère, la science et le génie de M. Cuvier exercèrent de prime abord sur les savane de la capitale qui étaient à même de le juger.

Sa santé à cette époque paraissait entièrement dérangée par ses travaux de cabinet. Il était pâle, maigre, se plaignait de douleurs à la poitrine, et d’une toux sèche, qui semblait annoncer une disposition imminente à la phthisie pulmonaire, ou même un premier degré de cette maladie. Pour ne pas être trop interrompu par cette toux pendant ses leçons, il avait soin de faire placer devant lui une carafe d’eau sucrée, dont il buvait de temps à autre quelques gorgées, pour prévenir la trop forte excitation que la parole, à haute voix, produisait sur ses poumons extrêmement irritables.

On était généralement émerveillé de sa science, de ses belles découvertes, des utiles réformes introduites par ce nouveau législateur dans l’étude de l’histoire naturelle ; mais on éprouvait en même temps un sentiment pénible, causé par la crainte de ne pas le conserver, de le voir bientôt arrêté dans sa carrière par une maladie mortelle, dont il paraissait porter les germes. Ces appréhensions se sont peu à peu dissipées. La santé de M. Cuvier se raffermit, au lieu de s’affaiblir, par la variété de ses occupations. La déclamation à laquelle ses cours le forçaient de se livrer, rendit ses poumons moins irritables, plus capables d’efforts, au point que cet exercice et le développement amené par quelques années de plus, lui donnèrent une force de voix et de poitrine qui étonnèrent ceux qui l’avaient connu dans le début de sa carrière.

On a de lui un excellent portrait en pied, fait à cette première époque, dans lequel ses traits et cet état de souffrance sont peints avec une grande vérité.

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