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Page:Notice historique sur les ouvrages et la vie de Cuvier.djvu/62

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on vient se reposer avec Buffon ; mais toujours, lorsqu’on a été délicieusement ému par ses tableaux enchanteurs, on veut revenir à Linnæus, pour classer avec ordre ces charmantes images, dont on craint de ne conserver qu’un souvenir confus ; et ce n’est pas sans doute le moindre mérite de ces deux écrivains, que d’inspirer continuellement le désir de revenir de l’un à l’autre, quoique cette alternative semble prouver et prouve en effet qu’il leur manque quelque chose à chacun.

« Malheureusement, comme il n’est que trop ordinaire, les imitateurs de Buffon et de Linnæus ont saisi précisément les parties défectueuses de la manière propre à chacun de leurs maîtres, et ce qui n’était en ceux-ci qu’une ombre légère dans un tableau magnifique, est devenu le caractère principal des productions de leurs disciples respectifs. Les uns n’ont pris de Linnæus que ses phrases sèches et néologiques, et n’ont point fait attention que lui-même ne regardait son système que comme l’échafaudage d’un édifice bien autrement important, et que, dans les histoires particulières que ses nombreux travaux lui ont permis d’écrire, il n’a rien négligé de ce qui tenait à l’existence de l’être qu’il décrivait. Les autres n’ont admiré dans Buffon que ses vues générales et son style pompeux, sans remarquer qu’il ne plaçait ces brillans ofnemens que sur des faits recueillis par la plus judicieuse critique, et que même cette nomenclature qu’ils font profession de mépriser est toujours établie par lui avec une grande érudition, et sur les discussions les plus soignées et les plus ingénieuses. »