Aller au contenu

Page:Nouvelles de Batacchi, (édition Liseux) 1880-1882.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
59
À CHEVAL


Il se baisse ; quoique lourde, il la prend en main ;
Du petit cabinet il ouvre la porte,
Serre les dents, étend le bras en arrière
Pour le ramener vivement en avant ;
Il lance la pierre, et le coup est si bien dirigé
Qu’il atteint son ennemi en pleine poitrine.

Comme un bœuf dont le boucher a frappé
La tête avec la pesante massue,
Tombe sur le sol et y reste immobile,
Ainsi ce mort donna par terre un coup.
Il y resta sans agiter ses membres,
Il ne semblait pas que c’eût été lui.

Le Buti ne l’entendant pas remuer :
« Malheureux que je suis ! L’aurais-je par hasard tué ?
» Ah ! que diable ai-je fait ? Ah ! je suis désolé !
» Malheur à moi ! je suis perdu…
» Peut-être fait-il le mort ?… Il est si méchant !…
» Ah ! il n’est que trop vrai !… Que le Christ me vienne en aide !

» Que va-t-il arriver de moi ? Comment cacher
» Cet homicide ? Pourrai-je nier l’ancienne
» Et furieuse haine que j’avais pour lui ?
» Ah ! tout le monde sait combien j’ai été son ennemi !
» Oh ! Saint François ! viens à mon secours !
» En ressuscitant cet affreux vaurien. »

Silencieux, en lui-même il réfléchit
Aux moyens de se tirer d’affaire ;
Après avoir formé plusieurs projets,
Il se souvient que pour la femme de ce Duc
Frère Marco paraissait éprouver quelque amour
Et que le Duc est un homme d’une jalousie féroce.