Aller au contenu

Page:Otlet - Traité de documentation, 1934.djvu/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
230
243
LE LIVRE ET LE DOCUMENT

images faisant voir le fonctionnement même de l’organe.[1]

c) Les actualités. — Elles constituent en réalité l’édition d’un grand journal. Des prouesses de rapidité s’y développent. Ainsi aux obsèques du Président Doumer. Pathé Journal disposait de trois camions sonores et de quatre opérateurs muets et volants ; le jour même, à 21 heures, cinq copies arrivaient à Bruxelles et y étaient projetées.

d) Une œuvre de condensation a été commencée dans le film. Ainsi l’Empire Marketing Board a procédé à des extraits de vieilles bandes documentaires soigneusement sélectionnées et montées selon une idée directrice bien nette, autour d’un thème central ou d’un leit motiv, par ex. le Niagara devenant le symbole de la puissance et de la richesse du Canada. Des kilomètres et des kilomètres de pellicules ont été condensés en quelques centaines de mètres, riches de vie et de rythme.

De même qu’on fait des livres avec des livres, extrayant, combinant, amalgamant, de même on fait des films avec des films, sélectionnant, modernisant, redonnant vie nouvelle à fixations anciennes.

243.364 FILMS ÉDUCATIFS.

a) Le nombre de films instructifs et documentaires produite en 1932 est de 416. Ces films ont été produits par 141 sociétés et ont ensemble une longueur de 238,832 mètres. Le tableau des six dernières années montre une forte régression. 1932 : 141 producteurs, 429 films, 244,086 m. ; 1931 : 160 producteurs, 469 films, 324,284 m. ; 1930 : 194 producteurs, 658 films, 418,374 m. ; 1929 : 215 producteurs, 728 films, 412,803 m. ; 1928 : 222 producteurs, 808 films, 455,039 m. ; 1927 : 214 producteurs, 870 films, 409,619 m.

b) Dans l’enseignement, le film formant spectacle retient complètement l’attention de l’élève que rien ne vient distraire durant la projection. C’est un maître inlassable et qui peut répéter indéfiniment la même leçon. Il est de taille à faire gagner dans certaines parties de l’enseignement, jusqu’à un an sur trois. On peut présenter des expériences de mécanique, par exemple, avec la dernière aisance, tandis que dans une classe seuls les élèves du premier rang auraient pu les suivre. Un film américain sur l’industrie laitière fait comprendre aux ouvriers agricoles les plus obtus dans quelles conditions d’hygiène il importe de traiter les vaches et de préparer le lait, sous peine si on les néglige, de causer de vraies catastrophes.

Edison, estimant que le cours ordinaire des études « représente un maximum d’ennuis pour un minimum d’intérêt », fut amené le premier à créer pour l’éducation de son petit-fils, des films destinés à enseigner la physique, la chimie et l’histoire naturelle. Maintenant dans l’enseignement le cinéma complète les explications verbales, les manipulations des expériences, la lecture des livres, la visite des musées. Les films tournés à des vitesses différentes montrent plus clairement le détail d’un mouvement rapide ou difficile, en raccourci l’ensemble d’une évolution insensible.[2]

Aux États-Unis l’enseignement par le film, la visual education, a fait l’objet d’études approfondies. Les éditeurs se préparent à éditer des livres comportant des textes en liaison avec l’illustration des films. On entrevoit une économie dans la méthode. La ville de Chicago annonce qu’elle gagnerait trois millions de dollars par an si toutes les écoles étaient équipées par la « visual education ».

c) Deux méthodes sont en présence : 1° créer des films pour chaque cours de l’école, faire cadrer exactement ces films avec les programmes, et même avec chaque leçon ; 2° aux films ainsi mécanisés qui forcent le spectateur à accepter ce qu’on lui donne, substituer des visions plus libres de la réalité ou de l’imagination créatrice (vues de l’éducation nouvelle).

L’utilisation pédagogique rationnelle du film exige la possession de la pellicule qui convient au moment même où elle peut le mieux servir à illustrer la leçon, c’est-à-dire à l’heure de cette leçon. Pour cela, il conviendrait d’avoir à l’école une petite collection de films comme on a une bibliothèque.

d) La pédagogie par le cinéma est partout à l’ordre du jour. Au Japon elle s’est extraordinairement développée. On prétend que les 120 millions qui y ont été consacrés à cette forme d’enseignement ont déjà permis, sur une seule génération, de gagner trois années d’études. Le grand progrès réalisé récemment consiste à pouvoir rendre fixe à volonté le film qui est déroulé et d’attirer ainsi l’attention sur les passages de grand intérêt. Une lampe à incandescence construite spécialement, munie d’un réflecteur parabolique, évite toute inflammabilité. Les appareils deviennent petits au point de pouvoir être transportés dans une petite caisse ne pesant guère 15 kg. À partir de 1,300 francs, on peut acquérir un appareil projetant à 8 mètres des images donnant un écran de 2 mètres sur 2. Il fonctionne au moteur ou à la main. Les films étant à perforation universelle, ils peuvent passer indifféremment sur tous les appareils. À défaut de courant électrique, on peut se servir d’accumulateurs portatifs. L’obscurité des salles s’obtient par la peinture en noir des rideaux existants.

La méthode d’enseignement par le cinéma à arrêt

  1. Le Phonoscope à cordes vibrantes, par le Dr Clary. Revue Scientifique, 13 août 1932, p. 464. Il permet à l’homme d’exprimer et de faire entendre sa pensée.
  2. Sluys, A. — La cinématographie scolaire et postscolaire. — Document n° 45 de la Ligue de l’Enseignement. Bruxelles 1922.