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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/78

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On venait de sortir de l’église ; il était onze heures, et l’on se hâtait vers les Pelleteries. Gustinet chantait une chanson au refrain très drôle et très compliqué qu’on avait grand’peine à reprendre ; ceux qui se trompaient disaient de grosses bêtises ; c’était la beauté de la chanson ; beaucoup se trompaient exprès ; on riait. En passant devant les villages, un accordéon manié par un adolescent bossu bégayait une marche lente ; les femmes, s’essayant à prendre le pas, faisaient des enjambées longues comme des glissades et leurs genoux se dessinaient sous leurs jupes tendues.

On arriva à onze heures et demie. Victorine et Louise, la femme d’Auguste, se précipitèrent vers la maison ; les seins leur faisaient mal et elles avaient grand’hâte de faire téter les petits. Les autres se dirigèrent vers la grange où la table était dressée ; la place de la mariée était marquée par un drap fixé au mur et sur lequel on avait épingle des roses.

Tout le monde avait faim ; on mangea vite la soupe et les poules bouillies. Le musicien, au bout de la table, eut la charge de faire manger les enfants ; mais ils prirent tant de soupe et mordirent à si belles dents dans la miche, qu’ils furent vite rassasiés ; ils le regrettèrent bien quand ils virent qu’on apportait des poulets rôtis et des plats de viande de boucherie.

Le bossu, lui, avait l’expérience des bonnes choses ; il faisait souvent des noces, et il y prenait toujours un plaisir énorme. Il ne buvait point au premier repas, parce que les musiciens qui s’enivrent dès le matin ne sont pas beaucoup recherchés. Il ne buvait pas, mais il mangeait ; pas de pain, très peu de pain : une