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Page:Pérochon - Les Hommes frénétiques, 1925.djvu/248

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LES HOMMES FRÉNÉTIQUES

Car Nouhou, ennemi des combats, songeait à faire alliance avec l’homme sec, comme il avait fait avec Moûh, avec Bêê et avec Horoho.

L’homme, ayant bu le lait, avait tendu les mains vers les femmes et les jeunes chasseurs…

C’est pourquoi Nouhou soutenait à présent la tête de l’homme sec ; il demandait au feu d’éveiller la force du pauvre corps déchiré et, pour faciliter l’enchantement, il répétait, d’une voix monotone, des syllabes longues et douces.

Revenus de leur surprise, les premiers chasseurs ouvrirent brusquement le cercle et s’avancèrent en grondant. Mais, sans s’interrompre, Nouhou, d’un geste, les écarta. Alors, ils couchèrent aussi Éléoum près du feu et glissèrent sous sa main le marteau rouge ; puis ils s’accroupirent, silencieux et méfiants.

Nouhou déposait près de l’étranger des fruits choisis, des viandes de haut parfum, de chaudes fourrures. Pour sceller définitivement l’alliance, il prit un enfant au sein d’une femme tremblante et l’approcha de l’homme sec. Le maudit tendit ses bras faibles ; ses doigts caressèrent l’enfant et une joie incomparable le transfigura. La tribu, jusque-là anxieuse, respira.

Cependant, les premiers chasseurs grondaient encore. Éléoum demeurait immobile et muet, et l’affreuse blessure de son ventre apparaissait aux yeux de la tribu. Des femmes crièrent, puis de vieux chasseurs pleins d’inquiétude.

— Éléoum ! Éléoum !

Oréa, le père, s’avança près du gisant, et il appela de toute la force de sa voix :

— Éléoum ! Éléoum !

On vit le jeune chef sortir lentement de la mort.