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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/166

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l’Architecture, à fin de prendre quelque conseil de son industrie. Or en ce temps-là, vn Bourgeois de la Rochelle nommé l’Hermite, m’auoit fait présent de deux coquilles bien grosses, sçauoir est, de la coquille d’vn pourpre (Murex L.), et l’autre d’vn buxine (buccin), lesquelles auoyent esté apportees de la Guinée, et estoyent toutes deux faites en façon de limace, et ligne aspirale : mais celle du buxine estoit plus forte, et plus grande que l’autre, toutesfois veu le propos que i’ay tenu cy dessus, c’est que Dieu a donné plus d’industrie és choses foibles, que non pas aux fortes, ie m’arrestay à contempler de plus pres la coquille du pourpre, que non pas celle du buxine, parce que ie m’asseurois, que Dieu luy auroit donné quelque chose d’auantage, pour recompenser, sa foiblesse. Et ainsi, estant long-temps arresté sur ces pensees i’auisay en la coquille du pourpre, qu’il y auoit un nombre de pointes assez grosses qui estoyent à l’entour de ladite coquille : ie m’asseuray deslors, que, non sans cause, lesdites cornes auoyent esté formees, et que cela estoit autant de ballouars (boulevards) et defenses, pour la forteresse et retraitte dudit pourpre. Quoy voyant, ne trouuay rien meilleur, pour edifier ma Ville de forteresse, que de prendre exemple sur la forteresse dudit pourpre, et pris quant et quant vn compas, reigle, et autres outils necessaires, pour faire mon pourtrait. Premierement, ie fis la figure d’vne grande place quarree, à l’entour de laquelle ie fis le plan d’vn grand nombre de maisons, ausquelles ie mis les fenestres, portes et boutiques, ayans toutes leur regard deuers la partie exterieure du plan et ruës de la Ville, et aupres d’vn des anglets de ladite place, ie fis le plan d’vn grand portal, sur lequel ie marquay le plan de la maison, ou demeurance du principal Gouuerneur de ladite Ville, à fin que nul n’entrast en ladite place, sans le congé du Gouuerneur, et à l’entour de ladite place, ie fis le plan de certains auuans, ou basses galleries, pour tenir l’artillerie à couuert, et fis le plan en telle sorte, que les murailles du deuant de la gallerie seruiront de defense et de batterie, y ayant plusieurs canonnieres tout autour, qui auront toutes leur regard au centre de ladite place, à fin que si les ennemis entroyent par mine en ladite place, que tout en vn moment, on eust moyen de les exterminer : quoy fait, ie commençay vn bout de rue, à l’issue dudit portail, enuironnant le plan des maisons que i’auois marquees, à