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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/180

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ADVERTISSEMENT
AUX LECTEURS.




A mi lecteur, le desir que i’ay que tu profites à la lecture de ce liure, m’a incité de t’aduertir que tu te donnes garde de enyurer ton esprit de sciences escriptes aux cabinets par vne theorique imaginatiue, ou crochetee de quelque liure escrit par imagination de ceux qui n’ont rien practiqué, et te donnes garde de croire les opinions de ceux qui disent et soustiennent que theorique a engendré la practique. Ceux qui enseignent telle doctrine prennent argument mal fondé, disans qu’il faut imaginer et figurer la chose que l’on veut faire en son esprit, deuant que mettre la main à sa besongne. Si l’homme pouuoit executer ses imaginations, ie tiendrois leur party et opinion : mais tant s’en faut, si les choses conceües aux esprits se pouvoyent executer, les souffleurs d’alchimie feroyent de belles choses, et ne s’amuseroyent à chercher l’espace de cinquante ans, comme plusieurs ont fait. Si la theorique figuree aux esprits des chefs de guerre se pouuoit executer, ils ne perdroyent iamais bataille. I’ose dire à la confusion de ceux qui tiennent telle opinion, qu’ils ne sçauroyent faire un soulier, non pas mesmes un talon de chausse, quand ils auroyent toutes les theoriques du monde. Ie demanderois à ceux qui tiennent telle opinion, quand ils auroyent estudié cinquante ans aux liures de Cosmographie et nauigation de la mer, et qu’ils auroyent les cartes de toutes régions et le cadran de la mer, le compas et les instruments astronomiques, voudroyent ils pourtant entreprendre de conduire vn nauire